C'est une peur qui revient de manière extrêmement fréquente chez les expatriés, les voyageurs ou même les touristes qui s'éloignent temporairement de leur famille : la peur de perdre un proche lorsqu'on est en voyage. L'idée d'être loin au moment où nos proches pourraient traverser quelque chose de difficile, être en danger ou même mourir, revient souvent lors des consultations avec ceux qui sont loin de chez eux.
J'ai peur de perdre un proche à l'étranger : le deuil en expatriation
Cette peur de perdre l'autre lorsque vous êtes loin peut être plus ou moins rationnelle.
Certains d'entre vous quittez votre pays en sachant que vous laissez un proche malade ou en grande vulnérabilité physique, un entourage vieillissant. Il est normal que vous soyez conscient que certaines étapes de vie peuvent se franchir en votre absence, et que vos proches auront potentiellement à affronter de lourdes épreuves.
Pour d'autres, l'angoisse de la mort et la perte de vos proches peuvent venir tout contaminer sans signaux d'alerte particuliers. Il semble alors que le simple fait de s'éloigner vienne créer psychiquement un risque majoré par le manque de proximité. Cette peur de la perte de l'autre peut alors créer de l'immobilité et gâcher des séjours à l'étranger.
La peur de perdre l'autre quand on est loin
La peur de la perte, autrement dit la peur de la mort de ses proches, est une peur normale, rationnelle et quasi universelle. Pour certains, cette peur va être reléguée au second plan et ne va pas venir polluer le quotidien. Mais peut-être que pour vous, qui êtes plus sensible ou plus attentif à vos ressentis, ce message émotionnel vient résonner régulièrement. Il vous rappelle que la mort peut venir abréger la vie et vous priver des personnes que vous aimez.
S'il existe un travail d'acceptation à faire pour tout un chacun face à cette mort inéluctable, il est important que cela ne vous empêcher pas de vivre.
Conseils pour apaiser ses inquiétudes
- Maintenez des liens, valorisez la qualité des moments que vous passez avec vos proches quand vous êtes là, pour éviter les regrets
- Si vous échangez peu, ou si vous êtes une personne qui maintient difficilement les liens virtuellement lorsque vous êtes loin, expliquez à vos proches et dites-leur à quel point ils sont importants pour vous malgré certaines périodes de silence.
- Rappelez-vous que l'anxiété ne constitue pas une protection, elle ne permet pas de prévenir ce que vous redoutez. Selon le dicton, la peur n'évite pas le danger, et vous vous doutez bien que même en ayant anticipé le pire, cela ne l'empêchera pas d'arriver.
- Travaillez à dépolluer votre cerveau des pensées anxieuses qui n'ont pas d'impact positif dans votre quotidien.
- Prévoyez des temps de retrouvailles, même s'ils sont peu réguliers. De fait, dans cette logique des regrets, dédier du temps à ceux qu'on aime c'est aussi un pas vers la sérénité.
- Dites ce qu'il y a à dire quand il est encore temps est une autre piste à considérer. Aujourd'hui non, il n'est pas trop tard et qu'importe votre peur du ridicule ou de la mièvrerie, si vous avez des choses importantes à dire à ceux que vous aimez, il est temps de le faire.
- Si vous ressentez trop d'anxiété, notamment si vous avez déjà expérimenté un deuil compliqué et que cela vient gâcher votre périple, n'hésitez pas à vous faire aider par un professionnel du fonctionnement psychique
Faire son deuil en expatriation
L'espace entre le risque et la réalité a été franchi, et vous avez perdu un proche alors que vous êtes loin de chez vous le temps d'un voyage, ou en tant qu'expatrié au long cours.
Les patients qui me parlent de leur souffrance d'avoir perdu un être aimé lorsqu'ils sont loin évoquent une sensation de vide, une solitude plus intense.
Assez rapidement, l'hésitation naît : faut-il rentrer ? Faut-il repartir une fois rentré ? Ou ne faut-il surtout pas bouger ?
À ce questionnement sur le plan du confort psychique s'ajoute régulièrement des paramètres d'ordre matériel et organisationnel, car la nouvelle peut-être soudaine et venir bouleverser un quotidien.
Certains de mes patients considèrent l'éloignement comme un soulagement. Le fait de pouvoir être anonyme notamment et de ne pas être considéré comme une personne en deuil peut être apaisant. Il peut ainsi être plus facile de répondre à un besoin d'isolement.
D'autres expatriés se sentent plus ouverts, et posent un autre regard sur les choses qui les entourent, décrivant une conscience plus aiguë de la beauté. Une sorte de partage mental avec le défunt peut alors naître, hors des rituels habituels qui aurait été les leurs s'ils avaient été au pays.
Au-delà de la douleur que représente l'absence de l'autre, l'impact d'être à distance lors de la perte d'un être cher peut avoir des effets différents pour chacun.
C'est pourquoi les conseils qui vont suivre ne peuvent en aucun cas constituer une généralité (comme toujours), et vous pouvez retenir uniquement ceux qui vous parlent et vous conviennent.
Etapes et pistes pour faire face au deuil
Que faire ? Nous l'avons vu, c'est souvent la première question qui se pose. Faut-il rentrer ou faut-il rester ?
- Le plus important pour répondre à cette question c'est d'abord d'être à l'écoute de votre ressenti. Rester ou partir vous appartient. Il n'y a pas de "il faut", il n'y a pas de "c'est mieux de", il n'y a pas de "il faudrait" ou "tu dois". Toutes ces petites phrases qui commencent par ces mots sont de fausses obligations. Il s'agit donc pour vous de tenir à distance la culpabilité pour faire valoir votre choix à vous. Qu'avez-vous envie de faire ?
- Si vous décidez de rester là où vous êtes, ou bien s'il ne vous est pas possible de rentrer auprès de vos proches pour partager les étapes du deuil, alors vous n'allez probablement pas pouvoir dire au revoir comme vous l'auriez souhaité. Il n'y aura pas de dîner tous ensemble et pas de retrouvailles pour se soutenir mutuellement. Cela représente-t-il un soulagement pour vous ? Ou cela risque-t-il de vous manquer ?
- Dans tous les cas, vous pouvez être présent autrement pour ceux qui restent, même si vous n'êtes pas près d'eux physiquement.
- Vous pouvez trouver votre rituel, même en étant loin. Peut-être pouvez-vous écrire à votre proche ? Vous rendre dans un lieu spécial ? Faire des prières ? À vous de trouver la voie qui vous apportera du soulagement et qui vous permettra d'avancer.
- En ce qui concerne le lieu dans lequel vous vous trouvez, pour certains il va être important d'aller quelque part où la normalité est accessible, pour pouvoir reconstruire une routine rassurante. Pour d'autres un décalage total va être positif, avec le besoin de couper absolument tout lien familier.
- Il est en tout cas à mon sens important d'être dans un endroit où la sociabilisation est possible, même si vous n'en n'avez pas envie. Cela permettra aussi que, si votre humeur change ou si vos besoins fluctuent, vous puissiez vous adresser à des gens autour de vous.
- Équilibrez les temps que vous passez seul et les temps pendant lesquels vous êtes entouré de manière à ne pas basculer dans les extrêmes.
- Dans tous les cas, vous devez garder à l'esprit qu'il est important de faire des projets et de ne pas rester seul trop longtemps.
- Si vous sentez que vous avez besoin de rentrer, et d'être près de votre proche, écoutez vous. Vous n'êtes absolument pas obligé de traverser cette épreuve tout seul et loin. Néanmoins la question financière sera peut-être une problématique, la question organisationnelle aussi.
- N'hésitez alors pas à demander des jours de congé en précisant la raison à votre employeur potentiel, à expliquer à vos enfants les raisons de votre absence, ou à solliciter vos proches pour un emprunt ou pour une aide financière pour payer votre billet. Les besoins liés à cette épreuve extrêmement difficile sont tout à fait légitimes.
Et comme toujours, si vous sentez que les choses sont trop douloureuses, que vous avez le sentiment de vous noyer dans la souffrance et que vous n'arrivez pas à affronter le quotidien, vous pouvez faire appel à un professionnel du soin psychique. Un accompagnement permet parfois de remobiliser vos ressources ou de peser les décisions qui tournent dans votre tête et que vous n'arrivez pas à prendre autrement.
Si vous souhaitez compléter cet article avec vos propres pistes et suggestions, n'hésitez pas à m'écrire de manière à ce que je puisse en faire profiter les lecteurs qui traversent les mêmes peurs ou la même épreuve que vous.
Cet article s'inscrit dans une série d'écrits publiés sur ce blog, concernant l'expatriation. Cela fait partie des thèmes d'expertise développés sur ce site : l'expatriation et l'impatriation.
Si vous observez que vous êtes bloqué, ou que vous n'arrivez pas à mobiliser vos ressources pour apprécier le quotidien, si vous vous interrogez sur une éventuelle dépression,
il est positif de pouvoir demander de l’aide à un professionnel ;
Je reste disponible via la page Contact de mon site pour toute question,
et si vous avez besoin de parler de ce que vous traversez en ce moment.
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Si vous avez un proche expat', voyageur, étudiant à l'étranger, nomade... qui pourrait apprécier d’avoir des points de repères pour se rassurer quant à la peur de la perte et face au deuil à l'étranger, n'hésitez pas à lui faire lire cet article.